L'outil magique : le "carnet de laboratoire"
Vous abandonnez toujours vos projets d’écriture en plein milieu ? Votre texte semble une montagne impossible à gravir et vous vous découragez avant d’arriver au sommet ? C’est normal ! L’écriture est un voyage au long cours et il n’est pas si facile de garder le cap pendant des mois et parfois davantage.
Voici un outil très simple à mettre en œuvre, qui peut sembler sans intérêt mais que j’ai moi-même expérimenté et fait expérimenter avec succès à des étudiant.e.s en écriture créative.
Il s’agit simplement de documenter toutes les sessions d’écriture en notant la date, éventuellement la durée, et surtout ce sur quoi on a travaillé (tel chapitre, tel passage de l’intrigue, la caractérisation d’un personnage…).
Pourquoi ?
Pour mettre un peu d’objectivité dans le grand magma de l’écriture.
Souvent on sous-estime le temps consacré à écrire, et face à une difficulté (manque de temps, chapitre compliqué) on oublie qu’en un mois à peine, on a écrit ces quatre chapitres, structuré la narration, etc. Parfois aussi, on surestime ce temps. C’est le cas pour les personnes qui passent beaucoup de temps à « rêver » leur livre, mais peu de temps les fesses posées sur leur chaise à choisir leurs mots et à… écrire tout simplement.
Pour se projeter. On peut estimer le temps dont on pense avoir besoin pour terminer une étape de l’écriture puis le matérialiser sur un calendrier qu’on glisse dans le cahier. Si on est en avance sur son « planning », cela donne de l’énergie. Et si on est en retard… c’est une bonne motivation pour se remettre au travail ! Les fans de stabylo peuvent surligner les étapes réalisées au fur et à mesure pour visualiser le degré d’avancement du travail.
Je conseille vraiment aux étudiant.e.s de découper leur calendrier en étapes, ou sous-objectifs. Il est plus encourageant d’atteindre plusieurs sous-objectifs que de viser directement la finalisation du projet global. Vous n’envisageriez sûrement pas de gravir la montagne d’une seule traite, sans jamais faire de halte !
Pour les personnes qui ont du mal à caler des sessions d’écriture dans leur emploi du temps, souvent parce qu’elles jugent que ce n’est pas légitime de « voler » du temps au détriment d’autres activités, le fait de matérialiser ce calendrier permet de ne pas lâcher leur projet. Cela peut sembler absurde, mais le fait de voir le calendrier écrit noir sur blanc aide à dire aux autres qu’on a besoin de temps pour travailler.
Ce carnet est aussi une trace de la vie de votre projet. Vous pourrez le ressortir lorsqu’au démarrage d’un nouveau manuscrit vous aurez la sensation de vous trouver devant une entreprise insurmontable. Vous avez déjà parcouru ces étapes une fois, donc vous êtes capable de les parcourir à nouveau. C’est fou comme le fait de voir ce qu’on a déjà réalisé (et un peu oublié) donne confiance en soi. Beaucoup plus que des encouragements extérieurs…
Expérimenter avec Truby la construction de l'arc narratif
C’est grâce aux étudiantes du Master d’écriture créative d’Orléans qui me demandaient « tu n’aurais pas un outil magique pour construire une structure narrative ? » que j’ai eu envie de me plonger dans un livre de J. Truby. Bon, elles ne me l’ont pas vraiment demandé comme ça, d’accord, mais passons sur les détails. ;-)
Donc j’ai eu envie d’expérimenter la méthode de Truby pour bâtir l’arc narratif de mon prochain roman jeunesse. Comme il s’agit de SF, je suis allée voir ce qu’il racontait sur les attendus de ce genre dans Anatomie des histoires, puis ce qu’il disait des étapes d’un récit. Je n’adhère pas absolument à tout (parfois on a l’impression qu’il parle surtout de scénarios convenant à des blockbusters américains et qu’on va se retrouver avec un récit très formaté…) mais j’ai quand même essayé d’appliquer ses principes à mon histoire.
Résultat :
1/ Je me suis bien amusée, un peu comme si je me lançais dans un jeu de rôle.
2/ Certaines des étapes de Truby me sont apparues comme des défis et il a fallu que je me creuse la tête – ça c’est plutôt positif !
3/ Je me suis dit que cette méthode ne se substituait pas à tout le travail préalable de construction de l’univers romanesque… mais qu’elle permettait, au moment de la structuration, de penser à certains détails qu’on pourrait oublier sans une trame aussi précise.
4/ J'ai navigué entre construction de la "trame Truby" et en parallèle développement des épisodes dans mon dossier de notes : le processus a été plutôt inspirant et j'ai aussi eu l'impression d'avoir gagné du temps par rapport à ma façon habituelle de faire.
PS. J’ai trouvé sur le site Ostramus.com une version sous forme de frise de la « méthode Truby ». Comme j’aime les outils visuels, je l’ai adaptée à ma sauce et elle m’a bien servi.
Bref, une lecture et une méthode que je vous recommande si vous avez envie de vous plonger un peu dans les rouages de la narration (en gardant un certain esprit critique et en vous écartant de la doctrine Truby quand vous sentez que c'est plus juste du point de vue de votre texte... car bien sûr aucun outil tout fait ne pourra se substituer à votre jugement !)